[You must be registered and logged in to see this link.]Voici une interview de Charlotte, elle parle de leur nouvel album :
Radio Metal : Tu es à Paris aujourd’hui pour parler de votre nouvel album et du concert que vous donnerez au mois de mai. Fais-tu ça dans tous les pays que Delain va traverser, ou la France a-t-elle simplement de la chance une fois de plus ?
Charlotte Wessels (chant) : La France est généralement l’un des pays où nous faisons beaucoup d’interviews et de promotion avant les tournées. Nous n’allons pas dans tous les pays mais nous passons presque toujours par la France et d’autres pays. Cette fois, c’était vraiment un coup de chance parce que j’étais de passage à Paris aujourd’hui ! C’est une heureuse coïncidence.
Votre guitariste, Timo Somers, ne sera pas de la partie sur cette tournée. Il sera remplacé par Bas Maas, actuel guitariste de Doro et ancien guitariste d’After Forever. Qu’est-ce qui a généré cette situation ?
Timo est très occupé par beaucoup de projets musicaux. Quand il a auditionné pour le poste de guitariste dans Delain, nous savions déjà qu’il avait la musique dans le sang. Il a tellement de projets à droite et à gauche, il était très occupé. Nous nous sommes demandés comment trouver une solution qui permettrait à tout le monde de respirer. Nous pensions déjà faire appel à deux guitaristes quand Bas Maas est arrivé. Ils étaient très enthousiastes à l’idée de se partager le travail. Ce n’est pas une solution pour laquelle on opterait automatiquement, mais quand l’option s’est présentée de faire appel à ces deux guitaristes très talentueux, et qui étaient prêts à se partager les responsabilités, nous nous sommes dits que ce serait une bonne idée. Nous sommes curieux de voir comment ça va se passer et d’avoir Bas sur scène avec nous pour la première fois.
Votre dernière tournée a pris fin en mai dernier (à Paris, d’ailleurs), vous serez bientôt de retour sur les routes et, entre-temps, vous avez réussi à enregistrer un album. Vous ne vous arrêtez jamais ? Le groupe souffre-t-il d’une sorte de boulimie artistique ?
Ce n’est vraiment pas le cas, pour être honnête. Présenté comme ça – fin de la tournée, enregistrement de l’album et nouvelle tournée –, tout semble s’être enchaîné très vite. En toute franchise, la dernière tournée était supposée être une tournée promo pour le nouvel album. Au final, nous avons donc, au contraire, rencontré d’énormes retards, mais nous avons des circonstances atténuantes, étant donné les problèmes que nous avons eus avec le label. Je pense que tout le monde a déjà entendu parler de ça sur Internet. Mais aujourd’hui, nous sommes très heureux que l’album soit terminé.
Comment s’est passé le processus de composition cette fois ? Es-tu toujours derrière les paroles ?
Je suis derrière les paroles mais aussi plus derrière la musique et les chansons elles-mêmes. Avant, Martijn [Westerholt , clavier] écrivait la plus grande partie de la musique et je m’occupais de la plupart des paroles. Sur les albums précédents, Jos apportait aussi sa touche sur certaines chansons. Cette fois, nous avons essayé autant que possible d’écrire à trois, à partir de zéro. On se réunissait dans une salle et on définissait le type de chanson pour lequel on était d’humeur. Au-delà de ça, beaucoup de gens ont influencé les chansons sur cet album. Lorsque les titres ont été plus ou moins finis, nous sommes allés en Suède pour des sessions de réécriture avec Tripod, notre équipe de producteurs. Ils ont aussi apposé leur sceau sur la musique. C’est comme ça que ça s’est passé : on a commencé par écrire des chansons en petit groupe, puis nous avons organisé des séances de réécriture avec Tripod en Suède. Ensuite, on a enregistré le tout !
Votre nouveau single, « We Are The Others », a été inspiré par le meurtre d’une jeune Britannique, Sophie Lancaster, en 2007, en raison de son look gothique. Tu sembles particulièrement touchée par ce sujet. Est-ce important pour toi de parler du droit à la différence ?
C’est très important. L’histoire de Sophie est extrêmement tragique, je pense que tout le monde en a entendu parler aux informations. Une vidéo d’animation a été réalisée en son honneur un an après sa mort. Quiconque l’a vue se sent obligatoirement très touché. Pour moi, c’est un sujet très spécial. J’ai commencé à étudier la théorie du genre il y a quelques temps. Il s’agit de la façon dont les différences entre les êtres humains peuvent modifier certains processus culturels ou politiques. Il est aussi beaucoup question de préjugés. Grandir en s’habillant de façon alternative ou en écoutant de la musique alternative… Tu dois savoir qu’il y a beaucoup de préjugés à ce sujet. Mais je ne veux pas en faire un problème centré uniquement sur les sous-cultures. C’est également un problème de sexe, d’ethnicité et de préférences sexuelles. Tous ces sujets nécessitent davantage de tolérance.
Ces dernières années, beaucoup de groupes ont commencé à parler de l’état du monde, de la crise financière, des problèmes environnementaux, d’écologie, etc. Ces thèmes étaient au centre de nombreux albums en 2011. Est-ce que ce sont également des sujets que vous abordez dans cet album ?
Les problèmes environnementaux, pas tellement. C’est quelque chose qui me préoccupe, mais pas qui m’inspire pour les paroles. Pas encore, du moins. Pour la plupart des chansons de cet album, l’influence principale était la réflexion sur la différence et la tolérance. Les interactions humaines, en quelque sorte.
« Dans un groupe, on a le sentiment d’évoluer naturellement vers un certain point parce qu’on passe des années à se contenter d’écrire des chansons. Et bien sûr, le public n’assiste pas à tout le processus. Il voit une étape du processus, qui s’appelle Lucidity, un autre qui s’appelle April Rain, puis We Are The Others. Il ignore ce qui s’est passé entre les deux. »
Nous n’avons pas encore pu écouter l’album mais vous avez inclus quelques extraits dans plusieurs vidéos postées sur Internet, et particulièrement dans le tour-trailer. Ces extraits sont extrêmement heavy et certains titres sont plutôt agressifs : « Hit Me With Your Best Shot », « Where Is The Blood », etc. Cet album marque-t-il un changement de direction pour Delain ?
J’ai beaucoup de mal à répondre à ce genre de questions. Généralement, c’est plus le public qui décide si nous avons ou non pris une certaine direction. Ce que je peux dire, c’est qu’au niveau des paroles, j’ai essayé de ne pas me restreindre en matière de sujets ou de paroles, alors qu’en temps normal j’aurais peut-être essayé de faire plus subtil. J’ai cherché mes limites, en me demandant : « Jusqu’où peux-tu t’exprimer sans dépasser un certain point ? » Musicalement, tu as déjà dit que c’était plus heavy. En fait, il y a beaucoup de chansons différentes sur l’album. Certaines sont beaucoup plus pop, d’autres sont plus heavy. Nous avons pris différentes directions mais je pense que ça correspond à une identité unique. C’est sans doute également dû à Tripod, notre équipe de production, et à Jacob Hellner, qui a travaillé avec Rammstein et Apocalyptica. Il a énormément travaillé avec le groupe, sur le groove. Quand on écoute l’album, on se rend compte qu’il y a moins d’orchestrations. C’est plus direct, avec plus de batterie et de guitare, plus « in your face ». Voilà ce que j’aime à propos de cet album, ce qui rend même les titres plus pop intenses, d’une certaine façon. Tout est vrai et authentique.
Vous avez déjà joué quelques titres sur scène. Avez-vous reçu des commentaires concernant cette évolution ? Qu’en disent les fans ? Vous n’avez pas peur qu’ils soient un peu perdus ?
Je pense que les réactions aux chansons que nous avons déjà jouées ont été très positives. Nous avons joué un titre intitulé « Get The Hell Out Of Me » qui a été immédiatement très populaire. Le public s’est mis à sauter et à applaudir sans même connaître la chanson, donc ça s’est bien passé. On nous a déjà parlé de « We Are The Others » comme single, mais étant donné que l’album a été retardé, nous allons sans doute en sortir un autre. Il s’agira sans doute de « Get The Devil Out Of Me ». Le public pourra certainement l’entendre assez vite. Je pense que le public a très bien réagi à ces chansons. La façon dont ils répondront à l’album dans son intégralité est imprévisible mais, moi, je l’adore ! [rires] Je ne peux qu’espérer que d’autres l’apprécieront aussi ! Je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas le cas !
Peut-être parce que le changement semble être très important – par rapport à Lucidity, du moins, peut-être pas à April Rain…
J’imagine. Dans un groupe, on a le sentiment d’évoluer naturellement vers un certain point parce qu’on passe des années à se contenter d’écrire des chansons. Et bien sûr, le public n’assiste pas à tout le processus. Il voit une étape du processus, qui s’appelle Lucidity, un autre qui s’appelle April Rain, puis We Are The Others. Il ignore ce qui s’est passé entre les deux. Les choix qu’on peut effectuer ne viennent pas d’une envie soudaine de faire autre chose, ils viennent naturellement.
(A propos de Roadrunner Records) « Nous avions toujours eu de très bonnes relations de travail avec le label, nous étions très satisfaits. Par la suite, nous sommes passés chez Warner. Évidemment, ils ne nous ont pas signés et ils n’étaient pas exactement à 100 % derrière l’album. »
L’artwork de l’album est très original, très art moderne. On voit rarement ce genre de pochette chez un groupe de metal. Quel était le concept derrière cet artwork ?
Le concept se cache moins derrière l’artwork que derrière l’artiste lui-même. La pochette a été réalisée par Glenn Arthur, un artiste californien. Il travaille beaucoup avec cette imagerie Art Nouveau, comme tu viens de le dire, ainsi qu’avec des images steampunk. Je suis son travail depuis très longtemps, j’adore ce qu’il fait. Je pense que ce qu’il fait en matière d’art visuel est très proche de notre musique : c’est assez sombre mais il y a un aspect très esthétique. J’ai écrit des articles sur lui dans mon blog et nous avons fini par entrer en contact. Il m’a demandé : « Est-ce que votre reprise de ‘Small Town Boy’ est disponible sur iTunes ? Parce que je l’aime beaucoup ». Je me suis dit : « Oh mon Dieu, il aime ma musique ! », et j’ai pensé que nous devions travailler avec lui. En ce qui concerne le concept de l’artwork, je lui ai donné les paroles et il a puisé son inspiration là-dedans. Voilà comment ça s’est passé. Je suis très fière qu’il ait réalisé l’artwork. Il y aura également quelques surprises parce qu’il a réalisé des illustrations supplémentaires pour la pochette. C’est vraiment sympa.
Tu as déjà évoqué les problèmes que vous avez rencontrés pour sortir l’album. Pour ceux qui ne seraient pas au courant, peux-tu nous expliquer pourquoi la sortie a été retardée ?
C’est dû au fait que Roadrunner, chez qui nous étions signés, a été racheté par Warner. Nous avions toujours eu de très bonnes relations de travail avec le label, nous étions très satisfaits. Par la suite, nous sommes passés chez Warner. Évidemment, ils ne nous ont pas signés et ils n’étaient pas exactement à 100 % derrière l’album. L’ancien patron de Roadrunner dirige une entreprise aux Pays-Bas, CNR Music. Là-bas, l’album sera diffusé par ce label. Ce qui est drôle, c’est que l’album a été vendu à des pays Roadrunner. Au final, on travaille avec les mêmes personnes, ce qui est très sympa ! La différence, c’est que le nom n’est pas le même. Nous sommes très heureux d’avoir trouvé une solution. Officieusement, la date de sortie n’est pas encore annoncée ; c’est une information toute récente, et nous allons l’annoncer lundi. Alors, je t’en prie, ne publie pas cette interview avant lundi ! [rires] Beaucoup de gens étaient très inquiets, ils avaient même lancé des pétitions. Nous sommes très reconnaissants. C’était une situation très stressante pour nous mais la réaction des fans a été énorme. Aujourd’hui, nous sommes très heureux d’avoir trouvé une solution. (NDLR : la date de sortie a depuis été annoncée ; We Are The Others sortira le 1er juin au Benelux et en Allemagne, et le 4 juin au Royaume-Uni et en France.)
« Je préfère créer de la nouveauté. De nos jours, on peut voir n’importe quel concert sur YouTube. J’imagine que ce sera sympa de le faire, parce que j’aime écouter des titres live d’autres groupes, mais, pour moi, ce n’est pas ce qu’il y a de plus excitant. »
We Are The Others est le troisième album studio de Delain. Il était probablement trop tôt pour parler avant, mais commencez-vous à penser à un album live ?
[longue hésitation] Ce n’est pas ma préoccupation principale. Nous avons enregistré et mixé quelques chansons live, alors on dispose déjà de plusieurs titres de bonne qualité. Peut-être qu’on finira par le faire, et ce sera bien sûr très intéressant. Mais je préfère créer de la nouveauté. De nos jours, on peut voir n’importe quel concert sur YouTube. J’imagine que ce sera sympa de le faire, parce que j’aime écouter des titres live d’autres groupes, mais, pour moi, ce n’est pas ce qu’il y a de plus excitant. Je réfléchis beaucoup plus à l’album numéro quatre !
Tu participes à un projet artistique très intéressant avec Wendy Van Den Bogert, une photographe et designer néerlandaise qui a déjà réalisé plusieurs photoshoots pour Delain. Il s’agit d’un projet photo pour lequel vous recherchez des modèles. Peux-tu nous en dire un peu plus ?
Non ! [rires] En fait, c’est un projet qui explore le sujet dont on a déjà parlé : la diversité. La séance photos aura sans doute lieu en avril, alors ce sera rendu public très vite. Mais je ne veux pas parler en détails de ce que le projet contiendra. C’est une nouvelle direction pour moi. Je n’ai encore jamais créé d’art visuel de façon active, alors c’est vraiment tout nouveau. Wendy et moi nous sommes trouvées parce que nous voulions toutes les deux nous lancer dans un projet visuel et artistique. Nous nous sommes trouvées dans cette idée. Aujourd’hui, nous avons six projets dans nos tiroirs ! Tu verras tout ça quand ce sera terminé mais, pour l’instant, je vais garder les détails pour moi ! [rires]
Je suivrai ton blog pour connaître les derniers développements ! Dernière question : tu as récemment obtenu un diplôme en histoire de l’art ; félicitations ! L’art sous toutes ces formes est manifestement très important pour toi. Pourrais-tu t’imaginer évoluant dans un type d’art autre que la musique – dans la peinture, par exemple ?
Ce projet avec Wendy est un premier pas dans une nouvelle direction, pour voir ce que je pourrais faire dans le domaine visuel. J’aime écrire, peindre, dessiner, faire de la photo… Donc, oui, je peux l’imaginer mais je ne sais pas si c’est écrit ! [rires]
Interview réalisée le 24 mars 2011 à Paris
Retranscription et Traduction : Saff’
Introduction : Metal’O Phil